Bernard Georges Paul Maitre
est né le 20 mai 1923 à Héricourt (Haute-Saône (70))
Bernard est le premier enfant de la famille Maitre, son père Victor Paul Maitre exerce la profession de gendarme. D’origine suisse, il obtient la médaille militaire en combattant dans l’armée française durant la grande guerre. Sa mère Reine Georgette Koenig est une cousine éloignée de Pierre Koenig, maréchal de France et compagnon de la Libération. Outre Bernard la famille compte un autre garçon, Philippe né en novembre 1933. Ses grands parents et son oncle tiennent une boulangerie dans la ville.
A 14 ans le jeune homme intègre l’école des pupilles de la marine pour ensuite, en avril 1939, être admis à l’Ecole des Mousses à bord du navire école l’Armorique en rade de Brest. Bon élève il opte pour la spécialité de radio, formation qu’il effectue à Port Louis en face de Lorient.
Matelot breveté radio en octobre 1940, il fait un bref passage sur le ravitailleur de sous-marins Jules Verne pour apprendre à connaître le monde de la « sous-marinade ». Le 4 novembre 1940, il « pose son sac » dans le poste d’équipage du sous- marin Casabianca. Après 14 mois passés sur ce bâtiment, nous le retrouvons dans le kiosque du sous marin Sidi Ferruch, puis en mars 1942 à la 2éme compagnie de garde de Toulon. Il sera l’un des nombreux spectateurs impuissants du sabordage de la flotte, cette tragédie maritime qui se déroule dans la nuit du vendredi 27 au samedi 28 novembre.
Le 5 décembre 1942, alors que Toulon est envahi par les troupes allemandes, le matelot Maitre obtient une permission de 90 jours qui met un terme à ses 5 années au service dans la marine nationale. Il y a consacré toute son adolescence.
A cette époque, son père est en poste à Sétif en Algérie et son oncle Michel Maitre est prisonnier dans un « Oflag » en Poméranie (Pologne). Bernard élit alors domicile chez sa tante et marraine, Julie Koenig à Cravanche (territoire de Belfort). Outre une résidence, il a besoin d’un métier pour être dans la légalité de l’époque et pour obtenir les titres de rationnement. Alors, le civil Bernard Maitre s’installe comme artisan « mécanicien radio » .
C’est parce qu’il a un caractère bien trempé et un sens patriotique prononcé, qu’il essaye, avec l’aide de sa famille, d’entrer en contact avec la résistance afin de participer au combat pour libérer la France. L’occasion lui est donnée en juillet 1943, quand il réussit à entrer dans les Francs Tireurs Partisans Français (FTPF), au sein de la compagnie Valmy.
Bernard, tout en faisant partie de l’état major, est affecté au groupe n°9 à Luxeuil où il recrute des jeunes gens dont il ne livra jamais les noms, même sous la torture. Il participe à de nombreux sabotages,
- Le 7 septembre, incendie de 30 quintaux de foin,
- Le 7 novembre, incendie d’une féculerie travaillant pour l’occupant, à Corbenay,
- Le même jour, destruction de 3 pylônes électriques,
- Le 11 novembre, sabotage de locomotives au dépôt d’Ailleviliers et dans les gares de Lure et Luxeuil,
- Le 2 décembre, sabotage d’une grue en gare de Ronchamp,
- Le 6 décembre, même opération en gare de Champagney,
ainsi que des réquisitions d’explosifs ou des attaques d’officiers allemands.
Beaucoup d’actions d’éclats, en peu de temps, obligent l’ennemi à réagir de façon brutale. Aidé par un traître, les allemands lancent une vague d’arrestations le 17 décembre 1943. Connaissant l’ascendant qu’il a sur ses camarades, les allemands saisissent Bernard Maitre parmi les premiers, alors qu’il est hébergé chez un cafetier de Luxeuil où il avait ses habitudes. Son oncle Albert Koenig, résistant dans la même compagnie et qui l’a aidé à rejoindre le groupe, est lui aussi arrêté et emprisonné jusqu’à la fin des hostilités.
Transféré à la prison de Lure il est interrogé et torturé sans relâche mais ne livre aucun nom. En 1945, trois de ses compagnons, revenus de Büchenwald citent les paroles de Bernard ;
« Ne vous en faites pas, vous êtes mariés, je suis célibataire je prends tout sur mon dos. Les dépôts d’armes je leur dis que c’est moi tout seul ».
En prison il soutient toujours ses camarades de combats et entonne en toute occasion « La Marseillaise ».
Il pense à s’évader et pour cela il transmet à ses grands-parents, boulangers à Héricourt, un petit message écrit en pointillé sur une petite étiquette et cachée dans son linge sale.
« Placez extrémité pain long avant cuisson voir Héricourt M, courage, espoir, baisers, Bernard. P.S scies neuves »
Même si la tentative n’aboutit pas, elle prouve que Bernard n’a jamais eu l’intention de capituler et à se laisser aller au désespoir.
Le 20 janvier 1944, Bernard et ses vingt compagnons d’infortune sont transférés à la prison de Vesoul, Profitant de ce regroupement, les allemands demandent à un photographe de prendre un cliché du groupe, afin de diffuser, dans les départements avoisinants, le portrait des ces « 21 terroristes ».
Le 7 février 1944, avec douze autres prisonniers il comparaît devant un tribunal militaire allemand, dans les locaux de l’Ecole Normale des filles.
Onze « condamnations à mort » sont prononcées, huit seront exécutées.
Le 16 février 1944, à la Combe Freteuille au lieu dit « Le Sabot » sur la commune de Frotey-Les-Vesoul, il est 8h04 quand Bernard Maitre tombe courageusement, la tête haute et sans bandeau, sous les balles allemandes. Il avait 20 ans.
D’après les témoins présents, il aurait lancé à ses compagnons encore en sursis;
« Adieu chers camarades, c’est aujourd’hui que l’on meurt pour la France » et en frappant très fort sur son cœur il ajoutera « Mais j’en ai, là ».
Les allemands lui rendent les honneurs militaires.
Dans sa cellule Bernard réussi à écrire cette lettre à sa mère, qu’il cache roulée en boule dans ses mains attachées dans le dos. Il réussit à la jeter par la bâche du camion sur le trajet qui le mène vers son lieu d’exécution.
Récupérée par des habitants du Transmarchement, faubourg de Vesoul, elle sera acheminée clandestinement à ses parents en Algérie.
« Ce 16-02-44
Ma Petite Maman Chérie, mon Petit Papa Chéri,
Mon Cher Petit Frère et toute ma Chère famille.
C’est un mercredi, par un beau matin de février, que mon pauvre corps tombera sous les balles de nos ennemis. Soyez fort, tous chers regrettés et soyez fiers de ma mort honorable.
Je suis né français et mourrai français. A cette dernière heure, mon esprit est calme ainsi que mon corps, mes idées bien définies ainsi que mes actes.
En cette heure tragique, mes bourreaux nazis ont eu l’audace de m’offrir une cigarette, je l’ai refusée. M’entendez vous ?
Pendant mon écrouement (sic) et par suite de l’infâme traitre « Georges », je n’ai absolument rien sollicité en leur faveur. C’est en digne et noble français que je veux mourir. Courage, Parents Chéris et Patriotes, je meurs mais dans l’espoir de me venger. Punissez les actes odieux qu’ils ont commis sur notre Terre Chérie.
Adieu France Chérie et Immortelle. Adieu, Petite Maman Chérie, Papa et Petit Frère. Je redis avant de mourir les nobles et belles paroles qu’un patriote comme moi a dites avant de mourir : « Je meurs pour que la France vive. » A un beau jour, à-Haut, près du Bon Dieu.
Elevé au grade de sous-lieutenant, attribution de la qualité de FFI, nomination au grade de Chevalier de la Légion d’Honneur pour faits exceptionnels de guerre et de résistance,
L’exemplaire N° 2657 du « Livre d’Or de la Résistance » a été imprimé à la mémoire de Bernard Maitre.
Une plaque commémorative a été inaugurée, place de l’Europe à Héricourt en 2004.
La 4ème promotion de l'Ecole des Mousses (2012 - 2013) porte le nom de Bernard Maitre
Lecture de la lettre :
- Légion d'Honneur (chev.)
- Médaille de la Résistance (Off.)
FTPF Haute Saône – Compagnie Valmy
LE RESEAU
C’est en juillet 1943 que le « Commandant Camille », futur Colonel FABIEN, crée le mouvement de résistance « Les Francs Tireurs et Partisans de France » (FTPF) de la Haute Saône. Celui-ci sera composé de 3 compagnies, dont la « Compagnie Valmy ». Répartie par petits groupes de 4 à 5 hommes, cette structure aura des&n...